Le gouvernement Sarkozy devrait finalement retirer le bouclier fiscal, devenu au fil du temps le symbole de l'injustice fiscale et de la contestation sociale.
A sa place, pour laver l’affront fait aux personnes concernées par cette mesure, il semble qu’un autre projet devrait voir le jour, à savoir la suppression de l’Impôt sur la fortune (ISF). Problème : là où le bouclier fiscal avait engendré un manque à gagner de 600 M€ par an dans les caisses de l’Etat, la suppression de l’ISF coûterait, elle, près de 4 milliards d’€, soit 6 fois plus !
Comment Nicolas Sarkozy se dépêtrera-t-il politiquement de ce qui ne manquera pas de passer pour un nouveau cadeau aux plus riches ? Et surtout, quelles nouvelles pistes de prélèvement permettront de compenser le manque à gagner engendré par cette suppression ?
Thomas Bronnec pour l’express.fr s’est penché sur la question et nous délivre quelques éléments de réponse.
Un boulet politique
Nicolas Sarkozy a choisi de passer outre, mais la dimension symbolique de l'ISF risque de s'inviter dans le débat lors de l'élection présidentielle. Jacques Chirac, qui s'était risqué à supprimer l'impôt sur la fortune pendant la première cohabitation, a toujours été persuadé que cela lui avait coûté la victoire en 1988. La gauche, qui l'avait rétabli dès l'année suivante, ne manquera pas de porter le fer contre Nicolas Sarkozy sur le mode: "supprimer l'impôt sur la fortune, c'est faire un cadeaux aux plus riches". Même si les députés UMP, emmenés par Michel Piron, étaient une centaine à réclamer la fin du bouclier fiscal et de l'ISF, certains d'entre eux sentent déjà le coup venir. Ainsi, Chantal Brunel a mis en garde le chef de l'Etat en soulignant : "En pleine crise, alors que le marché du travail est précaire et que le chômage frappe durement un grand nombre de Français, supprimer cet impôt sur la fortune sera interprété ni plus ni moins comme un cadeau fait aux riches". Nicolas Sarkozy a voulu se débarrasser d'un boulet politique, le bouclier fiscal, mais pourrait bien l'avoir simplement remplacé par un autre.
Un casse-tête financier
En 2009, l'ISF, qui n'est acquitté que par 560.000 contribuables, a rapporté 3,9 milliards d'euros. Le bouclier fiscal, lui, a coûté 679 millions. La suppression des deux dispositifs représente donc un manque à gagner de 3,2 milliards qu'il faudra évidemment compenser. Le problème, c'est que la piste esquissée par Nicolas Sarkozy, qui consiste à taxer les revenus du patrimoine et les plus-values, ne suffira sans doute pas. C'est en tous cas l'avis de Philippe Marini, rapporteur général du Budget au Sénat, qui s'exprimait dans la Tribune. Michel Piron préconisait de relever l'impôt sur les plus-values, de 19% à 27% pour le actions, par exemple - hors prélévements sociaux, qui représentent environ 12%. Et d'augmenter le prélèvement forfaitaire libératoire, une option qui consiste à donner à la banque le droit de prélever à la source l'impôt sur les gains perçus, en le faisant passer là aussi de 19% à 27%. Mais tout cela ne rapporte que 2 milliards. L'autre milliard, celui qui manque, devait, dans l'esprit des députés, être amené par la création d'une tranche supplémentaire de l'impôt sur le revenu. Mais on voit mal Nicolas Sarkozy, qui a martelé sa volonté de ne pas augmenter les impôts, se résoudre à une telle extrémité.
Un dilemme insoluble
Il y a d'autres pistes qui circulent pour combler le trou. Par exemple, la suppression pure et simple du prélèvement forfaitaire libératoire. De fait, ceci reviendrait à traiter les dividendes comme des revenus ordinaires. Et à les intégrer dans le calcul du revenu imposable. Comme le souligne le figaro, cela reviendrait à "appliquer aux revenus du capital une fiscalité beaucoup plus élevée puisque les ménages aisés sont imposés dans les tranches à 30% et 41%". Les plus-values mobilières et immobilières pourraient elles aussi être comprises dans le calcul du revenu imposable. Cette pistes est risquée, car elle pourrait se traduire par une augmentation d'impôt pour les 3 millions de foyers qui disposent de revenus foncier, et pour les 10 millions qui ont des revenus issus d'actions ou de Sicav. De quoi remettre en cause la promesse de ne pas augmenter les impôts au moment de mettre son bulletin de vote dans l'isoloir. L'Elysée, qui s'est engagée dans la voie d'une taxation des revenus issus du patrimoine, pourrait aussi, pour boucler le budget, maintenir une forme de taxation sur le patrimoine lui-même. Une hausse des taxes foncières serait ainsi à l'étude, selon les Echos.
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