A Hénin-Beaumont, terre électorale de Marine le Pen, le maire divers-gauche, Eugène Binaisse, tente vaille que vaille de résister aux ambitions du Front national.
BEAUMONT, Pas-de-Calais (Reuters) - A Hénin-Beaumont, terre électorale de Marine le Pen, le maire divers-gauche, Eugène Binaisse, tente vaille que vaille de résister aux ambitions du Front national. L'élu a ainsi refusé -pour l'instant- une salle pour le meeting que la candidate du Front national voudrait tenir symboliquement le 15 avril dans l'ex-ville minière du Pas-de-Calais, peu avant le premier tour de la présidentielle. Dans le bureau de la mairie tant convoitée par le FN, Eugène Binaisse, 70 ans, alterne autorité et humour. "Elle m'a envoyé une demande de parrainage (pour sa candidature à la présidentielle). Je la conserve comme une preuve de l'amour qu'elle me porte", ironise-t-il. Loin de nier les errements de certains de ses prédécesseurs, Eugène Binaisse montre le coffre-fort où l'ex-maire PS Gérard Dalongeville, poursuivi pour détournement de fonds, est accusé d'avoir entreposé de l'argent liquide pour de "menus services". Il craint aussi que le prochain livre de Gérard Dalongeville, qui, ne voulant pas "tomber seul", accuse plusieurs notables PS d'avoir participé à un système mafieux, n'alimente le chaudron politique local au seul bénéfice du FN. Cet ancien proviseur ne doit son siège qu'à l'invalidation du divers-gauche Daniel Duquenne, qui avait battu de justesse Marine Le Pen lors d'une municipale partielle en 2009. A peine élu en 2010 par la majorité du conseil municipal, il a subi les foudres de la future dirigeante du FN, dont il scrute désormais toutes les interventions médiatiques, histoire de prendre la mesure de son adversaire. Il n'a pas manqué une seule phrase du discours de Marine Le Pen lors d'un meeting dimanche dernier à Lille, ainsi que son numéro de chant "Paroles, Paroles", destiné à railler Nicolas Sarkozy. "Je ne savais pas qu'elle chantait", ironise-t-il en confiant avoir aussi lu le dernier livre de la présidente du FN, "Pour que vive la France". La minorité FN au conseil municipal décrit Eugène Binaisse comme un "homme autoritaire et hautain, qui se prend pour un sénateur et crée des tensions au sein de sa propre majorité". "EN 2013, LES IMPÔTS BAISSERONT" . Le maire, lui, évoque le mépris que lui porterait Marine Le Pen, laquelle a siégé quelques mois au conseil municipal avant d'y renoncer pour cause de cumul des mandats. "Pour elle, je ne représente rien. Elle a déclaré que j'étais illégitime", dit-il. A la tête d'une municipalité sous tutelle,
Eugène Binaisse dit se consacrer au redressement des finances de la ville de 26.000 habitants, mises à mal par la gestion hasardeuse de Gérard Dalongeville et un endettement excessif. "Il y avait un déficit de 12 millions d'euros, dont 9 millions de factures impayées", précise son directeur de cabinet, Maurice Lecat. De ce fait, les impôts locaux ont subi de fortes hausses qui ont accablé une population déjà éprouvée par la fermeture du dernier puits de mine en 1970, une difficile reconversion ainsi qu'un chômage très élevé. Le maire dit être sur la bonne voie. "En 2013, les impôts locaux baisseront et il y aura un bilan à défendre pour les prochaines municipales de 2014", promet-il. Dans cette attente, l'élu, qui semble hésiter entre détermination et fatalisme, se plaint de l'opposition frontiste. "Marine Le Pen est en attaque permanente, elle emploie des mots féroces. Ils viennent démolir, ils ne proposent pas". Selon lui, la bataille des municipales de 2014 risque d'être de nouveau "assez féroce". "Ils se croient déjà à la mairie mais ça ne paiera pas", assure-t-il. Depuis plusieurs semaines, Eugène Binaisse résiste aux menaces procédurières du FN, qui lui reproche de lui refuser une salle le 15 avril pour un meeting de Marine Le Pen. Contrairement à ce qu'il avait affirmé initialement, la salle n'était pas déjà occupée et le FN entend saisir le tribunal administratif si l'élu continue à "finasser." "Il est probable qu'on va devoir leur donner cette salle", concède Eugène Binaisse, tout en laissant entendre un peu plus tard que l'affaire n'est pas encore jouée.
Edité par Patrick Vignal
source Reuters capital.fr
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.