La sortie de l'euro et la refonte de l'Union européenne prônées par Marine Le Pen constitueraient un double chantier difficile, voire quasi impossible, à mettre en œuvre sans isoler la France vis-à-vis de ses partenaires, et porter un coup peut-être fatal à la monnaie unique. Si rien n'interdit en principe à un Etat de quitter l'euro, rien n'est prévu non plus pour organiser un tel choix. Et les conséquences seraient incalculables à la fois pour la France, et pour toute l'union monétaire, dont elle constitue, avec l'Allemagne, l'un des piliers fondateurs.
Réclamée par la candidate du FN, la fin de la participation française aux plans d'aide aux pays en grande difficulté – la Grèce, l'Irlande et le Portugal – risque ainsi d'aggraver encore la crise de la zone euro, sans forcément épargner la France.
Pour la présidente du FN, revenir au franc entraînerait une dépréciation de la nouvelle monnaie par rapport à l'euro et, selon les chiffres qu'elle cite, celle-ci est estimée à 9,4 % et entraînerait un renchérissement de 107 milliards d'euros du montant de la dette publique due aux créanciers étrangers sur sept ans. La plupart des économistes considèrent plutôt que la dévaluation serait bien supérieure à 20 %, et plomberait encore l'endettement de la France, tout en rognant la fortune des Français.
UNE TAXE INIMAGINABLE DANS L'UE
Bon nombre des mesures défendues par Marine Le Pen sont, quoiqu'il arrive, impossibles à mettre en œuvre sans un bras de fer incertain avec les partenaires européens. La taxe de 3 % imaginée par la candidate sur les importations contrevient aux principes de base de l'union douanière mise en place en Europe : une telle taxe est imaginable aux frontières de l'UE, mais pas entre les pays membres.
La monétisation de la dette publique, qui verrait la Banque de France faire marcher la planche à billets pour prêter à l'Etat à hauteur de 100 milliards d'euros par an, n'est pas possible en vertu des traités actuels. Selon ses détracteurs, la mesure risque de générer de l'inflation. Elle susciterait aussi une réaction immédiate de Bruxelles, qui croise déjà le fer avec la Hongrie, un pays non membre de la zone euro, au sujet de l'indépendance de sa banque centrale.
Philippe Ricard
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